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1/ Les champignons reflètent la radioactivité du milieu dans lequel ils vivent

2/ Les champignons présentent, en moyenne, des niveaux de concentration en césium 137 supérieurs à ceux de tous les produits agricoles

3/ Une grande variation des contaminations observées : des minimales et des maximales prévisibles

4/ La situation perdurera encore plusieurs dizaines d’années

 

Les champignons et la radioactivité due aux retombées de Tchernobyl  

En France, depuis l'accident de Tchernobyl au printemps 1986, les mesures de radioactivité régulièrement effectuées dans l'environnement et l'alimentation, montrent que les champignons présentent, en moyenne, des niveaux de concentration en césium 137 supérieurs à ceux de tous les autres produits agricoles. Toutefois, consommer 10 kg de champignons contaminés à 1000 Bq/kg conduirait à une dose de 0,1 millisievert (mSv) soit le dixième de la dose retenue actuellement comme référence à ne pas dépasser pour les personnes du public (hors irradiation naturelle ou médicale).

Explications.

1/ Les champignons reflètent la radioactivité du milieu dans lequel ils vivent

En 1986, juste après l'accident de Tchernobyl, la concentration moyenne mesurée en France dans les champignons par l'organisme alors en charge du contrôle de la radioactivité (le SCPRI) était de l’ordre de 400 becquerels par kilogramme de matière fraîche (Bq/kg frais). Actuellement, l'activité moyenne mesurée pour l'ensemble des champignons comestibles est de 70 Bq/kg.

Les champignons reflètent la radioactivité du milieu dans lequel ils vivent. Lorsqu’à l’automne 1986, les arbres et arbustes des forêts, bois ou bosquets dans lesquels poussent le plus de champignons, ont perdu leurs feuilles, le césium 137 qu’elles contenaient s'est ajouté aux dépôts déjà présents sur le sol, augmentant ainsi de manière importante la contamination de la litière. De plus, le sol ne subissant aucune perturbation, le césium 137* reste ainsi piégé dans la couche superficielle du sol.

* : la période radioactive du césium 137 est de 30 ans.

2/ Les champignons présentent, en moyenne, des niveaux de concentration en césium 137 supérieurs à ceux de tous les produits agricoles

A l'automne 1986, la concentration moyenne mesurée dans les champignons était déjà significativement supérieure à celle du lait, des légumes ou des céréales (10 fois plus que le maximum enregistré dans les céréales). Par la suite, et dès les premières semaines suivant l'accident, la teneur en césium a décru dans l’ensemble des produits agricoles, mais la diminution n’a pas été aussi significative pour les champignons. Elle est aujourd'hui environ 1000 fois plus élevée que celle des autres denrées (céréales, lait, viande...).

Ceci provient du fait que les sols cultivés régulièrement sont remaniés par le labour, qui contribue à homogénéiser le césium sur une épaisseur de 20 à 25 centimètres alors que le champignon puise principalement sa nourriture dans les cinq premiers centimètres du sol.

Conséquence : Le corps du champignon (ou mycélium) se "nourrit" dans un sol qui a été peu perturbé en 12 ans et qui contient encore plus de 75 % du césium 137 déposé après l’accident de Tchernobyl.

Cette persistance de la contamination en césium 137 des champignons est observée dans toutes les zones affectées par les retombées de l’accident de Tchernobyl notamment dans les pays voisins situés à l'est de la France, en particulier dans les zones forestières ou d’altitude du sud de l’Allemagne, d’Autriche et d’Italie.

3/ Une grande variation des contaminations observées : des minimales et des maximales prévisibles

Ces constatations générales, et les moyennes évoquées précédemment, ne doivent pas masquer le caractère très variable des niveaux de contamination. Les teneurs en césium 137 mesurées dans des champignons issus de l’ensemble du territoire varient entre 1 et plus de 1000 Bq/kg frais. Les différences sont dues, d’une part à l’hétérogénéité des dépôts de césium qui se sont formés au début de mai 1986, d’autre part aux différences entre espèces de champignons.

Globalement, l’Est de la France a été plus touché que l'Ouest par les retombées de Tchernobyl. Cependant, localement, des taches de contamination de surface et d’intensité variables peuvent se retrouver partout en fonction des pluies lors du passage des masses d’air contaminées, de l’altitude ou encore du boisement.

En outre, les espèces de champignons ne présentent pas la même propension à accumuler le césium : les espèces parasites qui vivent aux dépens des végétaux supérieurs sont les moins touchés ; les espèces qui vivent en association ou symbiose avec un arbre (les mycorhizes) puisent de grandes quantités d’éléments minéraux (donc de césium) mais une partie est restituée à l’arbre hôte ; les espèces qui vivent dans la litière (les saprophytes) sont les plus contaminés.

Sensibilité des différents champignons au césium 137

issu des retombées de l’accident de Tchernobyl

(classement simplifié, noms communs)

Très sensibles  

Moyennement sensibles  

Peu sensibles 

Bolet à chair jaune,
Bolet bai,
Bolet des bouviers,
Bolet moucheté,
Bolet jaune 
Girolle,
Chanterelle en entonnoir, jaunâtre,
Trompette de la mort
Rose des prés,
Psalliote des jachères,
Psalliote rougissante
Pied de mouton, Lactaire sanguin,
Lactaire délicieux
Armillaire couleur de miel
Clitocybe laqué,
Clitocybe améthiste 
 Pied bleu Cèpe de Bordeaux,
Tête de nègre,
Cèpe des pins,
Bolet à pied rouge,
Bolet orangé 
Pholiote ridée  Russule charbonnière   
    Vesse de loup à pierreries 
    Lépiote élevée ou coulemelle
Lépiote déguenillée 
    Morille ronde, morille brune,
Morille conique 
    Mousseron de la St Georges 

Un cas particulier : le cèpe de bordeaux (boletus edulis)

Avant l’accident de Tchernobyl, il était considéré comme une espèce très " sensible " à la radioactivité, car symbiotique et donc " accumulatrice " de césium. Or, les mesures effectuées après Tchernobyl, le présentent comme un des moins contaminés. Le cèpe de Bordeaux est une espèce à mycélium profond (plus de 4 cm sous la litière). Cette couche de sol était avant 1986 relativement riche en césium apporté par les retombées des tirs atmosphériques d’armes nucléaires. Le dépôt de Tchernobyl n’étant que peu parvenu à cette profondeur durant les années qui ont suivi l’accident, cette espèce se trouve désormais moins contaminée que la plupart de celles qui possèdent un mycélium plus superficiel, notamment celles qui vivent dans la litière et qui ne sont pourtant pas réputées " accumulatrices ".

Les différences entre les espèces de champignons et les variations locales de la contamination des sols expliquent les écarts observés et les valeurs maximales enregistrées.

Ainsi, un bolet à chair jaune qui pousserait sur un sol contenant 10 000 Bq/m2, comme dans certaines forêts des Vosges ou du Jura, pourrait présenter une teneur théorique en césium de 5000 Bq/kg frais. A l’inverse, un " mousseron " ou une " armillaire couleur de miel " qui pousserait sur un sol contenant 5000 Bq/kg de césium et pourtant situé à proximité de la forêt précédente, présenterait une contamination de 50 Bq/kg.

Et c’est ainsi que l’échantillon de champignon " petit gris " prélevé en 1998 à St Martin-Vésubie (Alpes Maritimes) et mesuré par la CRII-RAD à 3125 Bq/kg frais, est une illustration des valeurs maximales qui peuvent être ponctuellement atteintes.

4/ La situation perdurera encore plusieurs dizaines d’années

La diminution des teneurs en césium dans les sols forestiers et de prairie permanente est un phénomène très lent. Elle résulte principalement de la désintégration radioactive du césium 137, qui entraîne la disparition de la moitié de la radioactivité au bout de 30 ans. Compte tenu des variations présentées et expliquées précédemment, il faut s'attendre à ce que, durant encore plusieurs dizaines d'années, des champignons présentant des contaminations supérieures à 600 Bq/kg de césium 137 soient trouvés dans certaines zones de l’Est de la France. Comme aujourd'hui, ces cas resteront ponctuels et localisés.

Concernant les champignons provenant des pays n’appartenant à l’Union Européenne, les contrôles effectués par la Direction Générale de la Consommation, de la Concurrence et de la Répression des Fraudes ont pour but d’empêcher que des champignons dépassant 600 Bq/kg soient importés en France. Cette limite a été fixée le 31 mai 1986 après l’accident de Tchernobyl pour les produits alimentaires en provenance des pays hors de la Communauté.